Des millions d’euros volatilisés : les fraudes aux investissements au cœur d’une grande campagne de prévention
Alors que débute le mois de la cybersécurité, Safeonweb et ses partenaires, dont la Police Fédérale, présentent leur 10ème campagne de prévention. L’objectif : mettre le focus sur la fraude aux investissements qui cause chaque année des millions d’euros de préjudice.

Le scénario est bien rôdé : vous surfez sur les médias sociaux et tombez sur une publicité ou un « article » utilisant le témoignage d’une personnalité qui vous présente un investissement aux gains élevés, l’auteur vous invite à remplir un formulaire et vous recevez alors l’appel d’un « expert ». Celui-ci vous dirige sur une plateforme d’investissement et vous propose d’effectuer un test avec un petit montant et vous constatez des gains rapides. Il vous met ensuite la pression pour investir davantage. Et lorsque vous souhaitez récupérer vos gains, des délais d’attente et des frais imprévus s’ajoutent… Ensuite, vous recevez des menaces et n’entendez plus parler de l’escroc. Et surtout, votre argent a disparu ! Une autre personne revient ensuite à la charge en vous proposant de récupérer votre argent, moyennant payement, bien sûr. C’est le principe de la Recovery Room. Mais vous n’en verrez pas la couleur et perdrez encore plus…
Cet exemple illustre un cas typique de fraude à l’investissement, le thème de la dixième campagne de Safeonweb, plateforme gérée par le Centre pour la Cybersécurité Belgique (CCB).
Les signaux d’alerte aux faux investissements sont les suivants : des promesses de gains élevés et garantis, une pression pour investir vite, un manque de transparence de l’entreprise ou de l’intermédiaire et l’impossibilité de récupérer son argent. Et au final, d’importantes conséquences pour les victimes : pertes des économies, endettement, impacts psychologiques et sociaux, …
Quasi 16 millions de pertes !
Les chiffres de l’Autorité des Services et Marchés Financiers (FSMA) nous montrent une réalité qui fait froid dans le dos… Plus de 15,9 millions d’euros ont été perdus suite à des fraudes en ligne entre juillet et décembre 2024 dans notre pays, dont 12,5 millions d’euros via des plateformes de trading frauduleuses. L’an passé, l’arrondissement d’Anvers à lui seul a connu un montant annuel de fraude à l’investissement atteignant quasi les 8 millions d’euros… « Le plus inquiétant, c’est qu’il existe un chiffre noir car tout le monde ne prend pas contact avec la FSMA », ajoute Cathy Grimmeau, Communication officer du CCB.
Safeonweb et l’ensemble des partenaires, dont la Police Fédérale, veulent donc sensibiliser le public. La cible : les jeunes adultes tentés par la cryptomonnaie ou le public de plus de 40 ans ayant constitué un certain patrimoine. Safeonweb lance sa campagne avec le personnage de « Bill », le sac d’argent. « Notre idée n’est pas d’insister sur les comportements négatifs en blâmant les victimes mais de prôner le côté convivial et d’insister sur les bons gestes à adopter », ajoute Cathy Grimmeau.

Les conseils à suivre
Safeonweb vous invite à être plus intelligents que les escrocs en veillant à plusieurs éléments :
- Une proposition venue de nulle part ? Méfiez-vous !
- Passez votre interlocuteur au crible : est-il agréé ?
- Soyez critiques : restez calmes face à une proposition inattendue ;
- Comprenez le produit dans lequel vous investissez : s’il n’est pas clair, alors, vous prenez un risque ;
- Ne payez pas dans la précipitation ;
- Ne communiquez jamais vos données personnelles ou bancaires sans réfléchir ;
- On vous demande de transférer de l’argent vers un compte étranger ou en cryptomonnaie ? C’est un signe de fraude !
« Les fraudes à l’investissement sont réalisées par des sociétés non agréées ou copiées, le site web semble professionnel mais il est récent et les coordonnées vagues. On remarque aussi des incohérences comme un numéro anglais alors que la société est basée au Luxembourg, … », détaille Chloé Vanheuverswyn, coordinatrice à la FSMA.
Elle revient elle aussi sur quelques conseils de prévention. « Il faut rester critique lorsqu’on reçoit une proposition d’investissement non sollicitée via les réseaux sociaux ou par téléphone et vérifier à qui on a affaire. Recherchez la personne via Google, vérifiez l’identité du fournisseur via le site de la FSMA, exigez des informations claires et compréhensibles de la part de la société », ajoute-t-elle.
Et Filip Lacroix, expert en crypto à la Federal Computer Crime Unit, d’ajouter : « Le mot ''garanti'' lorsque l’on parle d’investissement dans les cryptomonnaies indique d’avance qu’il s’agit d’une escroquerie, car c’est impossible. Ceci doit constituer un signal pour le public. » De même qu’un excès d’assistance, par exemple : « Un employé ne peut clairement pas vous consacrer toute une journée. S’il reste en ligne très longtemps, ce n’est pas normal… »
Que faire si vous avez été victime ?
Vous avez été victime ? Il est important d’en prendre conscience, de ne pas culpabiliser, de couper tout contact avec les fraudeurs et de signaler la fraude (banque, plainte à la police, signalement à la FSMA), tout en restant prudents face au risque de nouvelle fraude (recovery room).
Connaissez-vous ConsumerConnect ?
L’inspection économique du SPF Economie vous invite aussi à signaler toute infraction à la législation sur la protection des consommateurs via la plateforme ConsumerConnect. « En 2023, 46.915 signalements ont été introduits auprès de nos services, dont 20.017 concernaient une fraude, pour un préjudice de 18.804.791 euros. Entre le 1er janvier 2021 et le 1er mars 2024, le montant s’élevait à 66.911.299 euros ! Le plus inquiétant, c’est que moins de 10% des victimes effectuent un signalement auprès de nos services… », regrette Benoit Pierard, attaché auprès de l’Inspection économique, dont les service sont parvenus à bloquer plus de 60 sites Internet frauduleux.