Sans justifications légales strictes, pas de visite domiciliaire

La Constitution belge protège la vie privée et l’inviolabilité du domicile. Dans certaines circonstances, une perquisition ou une visite domiciliaire sont néanmoins autorisées mais uniquement si elles respectent les conditions prévues par la loi. Que vise la notion de domicile ?

Dans une série de 8 articles explorant cette matière assez complexe, nous nous proposons d’examiner concrètement les différents cas dans lesquels un domicile peut être visité par un agent de la force publique.

Ce premier article abordera quant à lui, les principes généraux communs aux différentes perquisitions prévues par la loi du 7 juin 1969 fixant le temps pendant lequel il ne peut être procédé à des perquisitions ou visites domiciliaires, par le Code d’instruction criminelle et par la loi sur la fonction de police. 

© Zone POLBRUNO

Comment comprendre la notion de « domicile » ?



Dans le cadre de la protection du domicile privé contre les ingérences de l’autorité publique, la notion de «domicile» doit être entendue dans un sens large : cela concerne tous les lieux et leurs dépendances, occupés par une personne en vue d'y établir sa demeure ou sa résidence réelle et où elle a droit, à ce titre, au respect de son intimité, de sa tranquillité et plus généralement de sa vie privée.

Il n’est pas nécessaire que la personne demeurant dans le «domicile» soit inscrite aux registres de population (même les squatters sont visés et protégés). La qualité de l’occupant peut être : propriétaire, locataire, squatter, …

Les lieux publics (école, théâtre, église, bâtiment public, …) et les établissements accessibles au public (cafés, restaurants, …) ne rentrent pas dans cette définition.



En cette matière, on comprend donc que la notion de «domicile» est différente du sens commun, c‘est-à-dire l’adresse à laquelle on habite officiellement (= le lieu du principal établissement). En effet, toute personne en Belgique doit avoir un domicile connu et doit être inscrite au registre de la population de la commune où se trouve le domicile.

Il ne faut pas confondre non plus avec la notion de «résidence». Chacun peut en effet avoir, outre le lieu de son principal établissement (= domicile), des résidences en d’autres endroits, par exemple, un chalet de vacances en Ardennes ou un appartement à la mer du Nord …





C’est quoi concrètement un « domicile » ?



- C’est toute construction en dur, même non permanente, même mobile : une maison habitée, un logement, un appartement, une maison d’été (même non occupée de façon permanente), une cabane, une véranda, une cave, un grenier, un cabinet médical, …

- Ce sont les dépendances : des terrains clos, des granges, box de garage dans l’enclos ou non, des écuries, un chemin d’accès (sauf pour atteindre l’entrée principale s’il n’y a pas de barrière), entrée de garage, …

- Ce sont aussi les lieux assimilés, utilisés effectivement comme logement : une tente de camping, un motor-home, une caravane, une roulotte de forains, un bateau, une loge, une chambre d’hôtel, une chambre d’hôpital occupée par un patient, une cellule de prison (sauf pour les surveillants), les locaux professionnels occupés réellement, …





Pas de visite domiciliaire sans justifications légales strictes



La visite domiciliaire en tant que telle concerne de manière plus générale toute pénétration dans le domicile, tandis que la perquisition vise davantage l’acte d’enquête qu’est la fouille approfondie des lieux, réalisée éventuellement sous la contrainte, afin de constater, rechercher et saisir les preuves d’un crime ou d’un délit et/ou pour interpeller une personne.



L’ingérence d’une autorité publique dans l’exercice du droit au domicile est autorisée uniquement si elle est prévue par la loi et si cela s’avère nécessaire pour la protection des personnes et de l’ordre public, ainsi que pour la prévention des infractions.

Aucune perquisition ni visite domiciliaire ne peut être faite dans un lieu privé, non ouvert au public, pendant la nuit, c’est-à-dire entre neuf heures du soir et cinq heures du matin.

En principe, avant de pénétrer dans un lieu privé, il faut que les agents de la force publique aient en leur possession des éléments sérieux (pas une simple rumeur) indiquant qu’une infraction a été commise.



Dans les prochains articles, nous verrons qu’il existe certaines exceptions à ces principes.

Ce sera notamment le cas de la visite des lieux accessibles au public, des lieux dans lesquels les personnes sont en danger, des lieux d’où provient un appel à l’aide, des lieux visités à la demande ou sur base du consentement de la personne concernée, des lieux dans lesquels la police pénètre suite à un flagrant délit ou sur base d’un mandat de perquisition, …






Christophe ROMBOUX

Commissaire divisionnaire

Chef de corps de la zone de police ORNEAU-MEHAIGNE

Référence bibliographique : Vademecum du policier de terrain 2022 – Police pocket  - Claude BOTTAMEDI, Christophe ROMBOUX, Editions Kluwer, Liège, 2022, 795 pages.

En savoir plus



Notre série d'articles consacrés aux perquisitions et visites domiciliaires :

Sans justifications légales strictes, pas de visite domiciliaire

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Quand l’appel à la police provient d’un lieu privé, peut-elle y pénétrer d’initiative ?

La police peut-elle pénétrer d’office dans un lieu privé en cas de flagrant délit ?

Les modalités d’une visite domiciliaire par la police, en cas d’accord du propriétaire

Le mandat de perquisition : quand et comment est-il exécuté ?

Méthodes particulières de recherche et intrusion de la police dans un lieu privé

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